[Recette] Les sirops

Dans les bonnes maisons d'antan, et même encore du commencement du siècle dernier, mais avant la Grande Guerre, une dame, voire la cuisinière, connaissait la fabrication des sirops, dont on faisait alors grande consommation, non seulement en cas de maladie, mais également par gourmandise. En voici quelques bonnes recettes.

Le sirop violat
Ignoré à présent, il eut son heure de gloire vers la fin du XVIIIe siècle. En voici la recette, à peine retouchée : Disposer dans une terrine un quarteron [un quart de livre] de violettes épluchées, ur lequel on versera un demi-setier [un quart de litre environ] d'eau bouillante. Pour tenir les violettes sous l'eau, mettre dessus un poids : un galet de rivière, convenablement nettoyé, fera l'affaire. Couvrir et asseoir le récipient sur la cendre chaude deux heures durant. Passer et presser les violettes sur un linge pour en exprimer l'eau, dont il doit sortir près d'une pinte [0,93 l, à Paris]. Dans une poêle, mélanger deux livres et demie de sucre avec un demi-setier d'eau ; faire bouillir ; écumer. Quand trempant les doigts dans l'eau puis dans le sucre et les retrempant dans l'eau, le sucre qui y tient se casse net, il est temps d'y verser l'eau de violette sans aucunement laisser bouillir la mixture. Bien incorporer tous les éléments, puis verser le sirop danss une terrine, la couvrir et la déposer sur la cendre chaude pendant trois jours. La chaleur sera égale sans être trop forte. Le sirop ne doit pas bouillir. Laisser refroidir et mettre en bouteilles, qui seront cachetées et rangées à l'abri de la lumière dans un lieu sec et propre.

Le sirop de cerises
Deux livres de belles cerises aigres et saines feront l'affaire. Oter les queues. Oter les noyaux. Les mettre dans un récipient à feu sur la braise avec un grand verre d'eau. Après huit ou dix bouillons, les passer sur un tamis. Dans un autre récipient, jeter deux livres de sucre avec un grand verre d'eau et laisser fondre sur la braise douce. Fondu, faire bouillir le mélange et l'écumer. Il doit bouillir jusqu'à ce que y trempant l'écumoire et la secouant sur le sucre, et soufflant au travers des trous de l'instrument, il en sorte des étincelles de sucre. Verser le jus de cerises. Laisser bouillir ensemble jusqu'à ce que la mixture atteigne la consistance de sirop. Laisser refroidir et procéder comme précédemment.

Le sirop de capillaire
Le capillaire est le nom commun de plusieurs fougères à pétioles, qui appartiennent à la famille des polypodiacées

Prendre une once [16e partie de la livre, soit 30,594 g ] de feuilles de capillaire et la plonger dans une chopine [pas tout-à-fait le demi-litre], d'eau qui bout dans un pot à feu et la retirer dans le moment pour la mettre infuser sur la cendre chaude douze heures pour le moins. Passer au tamis. D'autre part, dans un poêlon, mettre une livre de sucre avec un bon verre d'eau. Faire bouillir ; écumer. Faire bouillir encore et tester le sucre comme pour le sirop violat. Verser dans le poêlon l'eau de capillaire sans faire bouillir. Dès que le mélange est opéré, l'ôter du feu et le verser dans une terrine à feu, la couvrir et la déposer sur la cendre chaude, soigneusement entretenue, trois jours durant. Le sirop est fait quand trempant deux doigts dans le liquide et les détachant l'un de l'autre un fil se forme entre eux et ne se rompt point facilement. Mettre le sirop en bouteilles et ne les boucher que refroidies complètement.